Un foiler c’est quoi ?
J’ai toujours aimé les engins permettant à l’Homme de se déplacer à grande vitesse sans moteur. Le vélo en est un, la voile en est un autre. Ce simple objet, généralement fait de tissu et conçu pour s’opposer à l’écoulement naturel de l’air, permet de faire le tour du monde ou de se déplacer à plus de 220km/h. Cependant il y a un hic… si le record du monde à la voile est bel et bien de plus de 220km/h, il a été réalisé sur terre, et donc sur des roues. Le record du monde sur l’eau est d’environ 120km/h. Pourquoi une telle différence ? La principale raison est que les frottements de l’eau sur la coque sont importants. De plus, la surface de l’eau est généralement recouverte de vagues qui rendent les appuis du bateau instables et irréguliers. Le facteur limitant se situe donc au niveau de l’interaction entre la coque et l’eau.
Mais comment améliorer cette interaction ? C’est le propre d’un bateau de flotter sur l’eau par la poussée d’Archimède, alors comment éviter ces frottements ? La réponse est : en faisant voler la coque au dessus de l’eau. Pour cela on utilise des ailes, comparables à celles d’un avion, mais qui sont immergées. Ces ailes sont appelées hydrofoils (plus généralement foils) et apportent beaucoup d’avantages :
– La coque n’est plus en contact avec l’eau donc il n’y a plus de frottements à ce niveau là
– Les appuis du bateau ne sont plus sur la surface de l’eau mais en profondeur, la où le milieu est stable et régulier
– La surface totale de contact avec l’eau est grandement réduite
– On peut gérer l’assiette et la gîte du bateau en jouant sur l’incidence des foils, et donc garder le bateau à plat quelque soit la force du vent
Un foiler c’est donc tout simplement un bateau qui possède des foils.
Réalisation :
Choix techniques et conception:
Si les foils sont une technologie récente et assez confidentielle, c’est parce qu’elle est complexe. C’est relativement facile de générer une poussée verticale avec un foil (portance) mais c’est très difficile de la contrôler et de la stabiliser pour que le bateau reste à une hauteur constante au dessus de l’eau.
Le plus souvent, on gère la portance d’un foil en réglant son angle d’incidence en temps réel. Or cela requiert des systèmes trop complexes pour un modèle réduit. Une autre solution est alors de faire en sorte que la portance du foil diminue au fur et à mesure que le bateau s’éloigne de la surface de l’eau. Pour cela j’ai décidé de faire des foils obliques, de telle manière qu’une partie de foil sorte de l’eau lorsque celui ci monte. J’ai quand même laissé des réglages d’incidence des foils pour optimiser leur fonctionnement, la hauteur du bateau en vol et sa vitesse. Pour cela j’ai monté les foils dans de petits blocs imprimés 3D facilement modifiables (en violet). Ces blocs sont eux mêmes montés dans un support réglable accroché aux coques (en vert).
Une autre variable à gérer lorsque l’on navigue sur des foils, c’est l’assiette du bateau. Comme on peut le voir sur les rendus ci contre, les foils sont situés à gauche et droite du bateau, à peu près au milieu de sa longueur. Le but est que le centre de poussée des foils soit situé au niveau du centre de gravité du bateau en navigation, pour qu’il monte en équilibre sans tomber en avant ou en arrière. Les pièces qui relient les tubes carbone aux coques (en rouge) permettent pour cela d’ajuster la position des foils par rapport à la coque centrale. Cependant, pour qu’un système soit stable il lui faut au moins 3 points d’appuis, et les foils n’en constituent que deux. C’est alors le rôle du stabilisateur, situé à l’arrière du bateau sous le safran, de maintenir l’assiette du bateau horizontale. Si le bateau est déséquilibré sur l’arrière alors le stabilisateur va regarder vers le haut et générer de la portance pour soutenir l’arrière du bateau. S’il est déséquilibré sur l’avant ce sera l’inverse. Cela peut être utile de pouvoir régler l’incidence du stabilisateur pour maintenir l’assiette du bateau le plus horizontale possible.
Fabrication :
– Les tubes qui relient les coques sont en carbone
– Le mât et la baume sont en aluminium
– La voile est en toile spi, découpée puis cousue collée
– Les foils et le safran ont une âme (structure interne qui donne le profil) imprimée 3D qui est ensuite stratifiée avec du carbone UD, sous pression.
– Les haubans sont en fil de Dynema
– Les voiles sont bordées par un servo treuil alimenté par une batterie lipo 3S de 11V.